La farine bio de Sandrine Giraud
À chaque numéro des Échos des Préalpes d’Azur, le Conseil de développement vous propose de découvrir un produit local et de saison, à travers l’œil avisé de l’un des producteurs ou l’une des productrices du Parc naturel régional.
En ce joli mois de mai, nous avons rencontré Sandrine Giraud. Jeune agricultrice sur la commune de Valderoure, elle y exploite environ 80 hectares de foin et de céréales, principalement du blé (10ha). Elle produit ce dernier pour l’alimentation animale et, depuis peu, pour la fabrication de farine alimentaire humaine.
Elle a préparé et passé un BPREA (brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole) à Carmejane dans l’idée de succéder à son père. Au début, elle avait un peu peur car elle reprenait une exploitation qui marchait bien, qui était viable. Elle a donc fait un prêt pour racheter le matériel de son père (environ 80 000 euros), puis a obtenu une DJA (Dotation Jeune Agriculteur) de 35000 euros, « ce qui n’est pas négligeable ».
C’est à partir de la seconde année d’exploitation que Sandrine a décidé de se reconvertir en agriculture biologique. « Mon père utilisait très peu d’engrais, j’aurais pu rester comme ça mais par conviction, j’ai voulu passer au bio. Faire de la farine pour l’alimentation humaine sans être bio, ce n’était pas cohérent pour moi. »
Actuellement en train de changer la variété de blé, elle s’oriente vers des variétés anciennes pour obtenir une farine avec le moins de gluten possible. Cette année, elle a essayé, le petit épeautre car il n’a jamais été génétiquement modifié, mais sa culture a été difficile et la densité de production reste faible. Il y en aura néanmoins lors de la prochaine récolte.
Mais Sandrine n’est pas seulement agricultrice, elle sauve aussi des vies quand elle a le temps ! En effet, quand elle parvient à dégager du temps personnel, elle le consacre à deux choses : l’une à son fils de 3 ans, et l’autre à son statut de pompier volontaire.
Le PNR, vecteur de rencontres entre clients et l’exploitation ?
Pour Sandrine, le PNR n’a pas encore été bénéfique pour l’entreprise Giraud. Mais elle a cependant nuancé son propos : « Je pense que le PNR ne nous a pas apporté grand-chose jusqu’à présent parce que l’on ne faisait pas de produits alimentaires pour les humains. » Sandrine produit environ 15 000 bottes de foin de 25 à 30 kg. En ce qui concerne les céréales, elle a récolté l’an dernier 10 tonnes de blé, transformé en partie en farine. Elle en vend aussi pour l’alimentation de la volaille. Pour la commercialisation de sa farine, Sandrine Giraud s’appuie particulièrement sur la vente directe et le bouche à oreille.
En revanche, la fête du Parc organisée l’an dernier à Valderoure lui a apporté de nombreux contacts. « Les agriculteurs locaux sont de plus en plus dans la démarche du bio et du circuit-court. » Pour le fourrage, elle se repose sur les coopératives agricoles de la Côte d’Azur (Mougins, Pégomas etc.), les centres équestres et les usines de parfumerie (dont MANE à Grasse). Elle reste donc dans le secteur des Alpes-Maritimes.
Les avantages et/ou inconvénients d’une reprise ?
D’après Sandrine, le plus compliqué pour une reprise d’exploitation, ce sont toutes les démarches administratives. Mais elle reste positive : « D’un autre côté, on a accès par ce biais à des subventions, on doit donc en retour pouvoir rendre des comptes. Avec les subventions ça a été confortable. Je ne dis pas que ça a été facile non plus. »
Sandrine n’est pas une « néo-rurale » puisque, dès son jeune âge, elle a aidé son père et a pu bénéficier de la reprise de sa clientèle. Elle développe désormais ses propres techniques de culture et de vente. Sandrine Giraud utilise plusieurs hangars pour entreposer son matériel et ses productions. Dans l’un d’entre eux, à Malamaire (hameau de Valderoure), il existe un ancien moulin laissé à l’abandon par les propriétaires actuels « Ils ignorent qu’il y a dans leur propriété un patrimoine qui pourrait servir aux repreneurs agricoles alentours. C’est dommage ».
Sandrine aimerait beaucoup reprendre ce moulin afin de pouvoir moudre son blé sur place. Actuellement, elle est obligée de se déplacer à Digne. En attendant une éventuelle réhabilitation du vieux moulin, Sandrine en a acheté un qui devrait être utilisable cet été. Elle pourra alors être plus réactive dans ses commandes et fournir des produits « à la demande » sans faire autant de trajets.
Une mise en marche d’un circuit court pérenne ?
La farine bio de Sandrine Giraud est l’exemple d’un réel circuit court entre elle et le boulanger de Valderoure. Elle vend en effet sa farine à la boulangerie de la commune pour en faire du pain bio. Lorsque les Deleuil ont repris la boulangerie de Valderoure, Sandrine leur a présenté son idée, et ils ont tout de suite adhéré.
Tous les week-end, le boulanger fait donc du pain bio avec la farine de l’entreprise Giraud, parfois même au feu de bois. Il façonne deux types de pain : intégral ou semi-complet selon le type de farine utilisée. Il vend également des paquets de farine.
La pression foncière sur ses épaules…
Seul hic pour Sandrine : la pression foncière. « Sur mes 80 hectares, j’en ai 10 en propriétés, et le reste est en location, avec un bail écrit, ou non. C’est le plus problématique, et cela concerne pratiquement tous les agriculteurs du territoire. » Toutes ses terres sont en location. Elle est donc protégée par son bail, mais la question qu’elle se pose est : jusqu’à quand ?
Les baux peuvent ne pas être renouvelés, et c’est inquiétant pour l’exploitation de Sandrine, car s’il y a vente, il faut avoir les moyens pour le locataire de racheter les terres. L’association « Terre de liens » pourrait être un possible moyen de protection. Affaire à suivre…
Manon Badard
Pour connaître d’autres producteurs qui peuvent vous fournir en fruits et légumes de saison, en fromages, en viande, en olives ou autres, consulter le guide des producteurs du PNR des Préalpes d’Azur ici : http://www.pnr-prealpesdazur.
et la carte des producteurs réalisée par le Conseil de développement avec OpenStreetMap : https://cddpnr06.org/ProdAGRI%
Je mange local, je mange PNR !